Saturation des couleurs
Pour changer, il pleut sur Paris. J'écoute le dernier album de Norah Jones, étonnamment jazzy, très abouti, au lieu d'aller à mon cours d'agrég sur Shakespeare, qui se révèle particulièrement naze, une interminable paraphrase de la pièce. Je trouve cela assez frappant d'ailleurs d'observer à quel point nos enseignants sont scindés en deux groupes: ceux qui se donnent vraiment du mal, nous mâchent le travail au maximum, et ont manifestement passé tout leur été à préparer ce semestre, et ceux qui se défaussent totalement de leurs responsabilités et n'en fichent pas une, ce que je trouve particulièrement honteux une année à concours. Lorsqu'on a un minimum de conscience professionnelle, on n'accepte pas un cours d'agrég si on n'est pas préparé à y passer du temps. En cela, je suis nostalgique des cours de khâgne, dans lesquels je puise d'ailleurs allègrement. Car, c'est l'un des détails amusants dont on prend conscience, au sein du programme (métonymie de la culture en général), tout se recoupe. Exemple: le débat sur l'abolition de l'esclavage éclaire certaines réflexions colonialistes dans Jane Eyre de Charlotte Brontë, qui relate une errance (le gros jeu de mot de l'année: Jane Eyre erre), qui n'est pas sans évoquer le Pilgrim's Progress de Bunyan, lui-même largement inspiré d'une œuvre telle que Everyman. Autre exemple: dans le sujet de civilisation "L'empire de l'Exécutif américain", on étudie les lois du New Deal et la crise de 1929, elle-même le sujet des Raisins de la colère, qui revisitent la notion de pastoralisme, elle-même parfois présente dans Jane Eyre.
Au programme d'hier soir, sortie groupée entre agrégatifs pour la représentation d'Everyman, "morality play" médiévale (XVe siècle) à l'amphi Richelieu de la Sorbonne par une troupe d'acteurs écossais. Je recommande la conception médiévale de la religion déclamée par des acteurs à la diction parfaite mais à l'accent écossais à couper au couteau, dépaysement garanti.
Voilà, That's All Folks, parce que je ne sèche que le premier cours... il faut que je file pour ma dose bi-quotidienne de "en raison d'un mouvement social, 1 train sur 2 environ sur le RER A". C'est beau la créativité à la RATP...