Cogito, ergo sum
Ca me désole de te le dire, cher René, mais tu avais tout faux. Moi, plus je réfléchis et moins j'existe.
Je suis une intello qui s'ennuie dans un bureau.
J'aime le terrain mais je n'ai pas toujours l'énergie d'y être.
Je suis un bourreau de travail doublée d'une flemmarde téléphage.
Je suis créative, mais je n'ai pas le talent ou le mental d'une vraie artiste.
Je suis une photographe qui avait deux de moyenne en cours de physique (ma seule bête noire) sur la lumière.
Je suis un peu nerd informatiquement mais demandez-moi de décrire ce qui se passe dans mon appareil photo numérique et je nage.
Les gens me croient cultivée, moi je me trouve ignare.
J'ai des ambitions de samu social avec un passé de cliente de palaces.
J'étais la première de la classe avec mon avenir devant moi et aujourd'hui je ne vois qu'un tunnel sans fin.
Les derniers de la classe ont fait HEC et gagnent 100.000 euros par an dans leurs métiers de directeurs dans la finance. Moi j'ai des mois à 500 euros quand tout va bien. Quand ils me questionnent, j'embellis, "oui, tout va bien", pour ne pas lire la pitié dans leurs yeux.
J'ai un immense appétit de vivre et de sourire, mais je trouve ma vie triste à pleurer depuis trois ans.
Je n'ai pas la moindre idée de ce qu'est le bonheur, seule ou en couple.
Dans mon coeur, je ne suis ni tout à fait française, ni tout à fait étrangère: écossaise, anglaise ou italienne.
Je suis une fille simple et tout n'est que paradoxe et complexité dans ma vie dont je n'ai plus guère le courage de démêler les fils.
On me dit attachante, mais en amour, les hommes que j'aime ne s'attachent pas à moi.
J'ai des kilos à perdre pour l'été et pourtant je ne mange jamais gras ou sucré.
Je suis très professionnelle dans mon travail et pourtant personne ne veut m'embaucher.
Je suis une journaliste qui, ces derniers temps, ne parvient pas à publier.
Je suis différente, pleine de contradictions et, au fond, je ne me sens jamais à ma place nulle part.
Je me dis qu'un jour, peut-être, miracle, un agent littéraire repèrera mon blog, mais moi je ne suis pas www.petiteanglaise.com qui ne parle que de son licenciement et de sa vie familiale, je ne suis pas Folie Privée consistante dans ses délires maniaco-dépressifs et ses beaux dessins, je ne suis pas Jeniquecestmythique qui parle toujours de cul. Tous trois édités grâce à leur blog, dans des genres très disparates. Mon blog est différent et multi-facettes comme moi; un jour il parle d'hommes, le lendemain de mon jardin et, au milieu, on dérape sur une critique ciné. Si je devais lui trouver un autre nom, ce serait "minute, papillon". Je ne vois pas qui ça pourrait intéresser d'en faire un livre.
Je sais, j'ai pas le moral, mais cette semaine rien ne va. J'ai enterré mon parrain hier soir. Ma tante maternelle que j'adore entre aujourd'hui à l'hôpital à Lyon pour se faire opérer deux fois de suite de kystes graves au foie. Mercredi prochain, c'est moi qui vais à l'hôpital pour une fibroscopie sur soupçon de hernie iatale.
Je m'ambitionne en Joseph Kessel et je suis coincée en Cosette des Misérables. Marre de tout ça...